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Goodbye Julia, Salam Sudan

Mohamed Kordofani fait entrer le cinéma soudanais dans une nouvelle ère avec Goodbye Julia. Premier film soudanais sélectionné à Cannes (obtient le Prix de la Liberté), en lice pour les Oscars et meilleur film africain 2023 aux Septimius Awards. Incarnée par l'amitié inédite entre deux femmes, le film raconte la séparation d'un état qui survient après 50 ans de guerre civile dans une société minée par le racisme, le classicisme et le patriarcat.

Après 3 court-métrages réalisés comme loisir en parallèle de sa carrière dans l’industrie aéronautique, Mohamed Kordofani accompli un virage professionnel risqué en quittant l’aviation pour investir ses économies dans la création d'une société de production à Khartoum et ainsi financer, produire et bien sur réaliser son premier long-métrage.

 

« En écrivant ce film, j’essaye de me débarrasser de ce racisme hérité. Je suis animé par un sentiment de culpabilité et un profond désir de réconciliation. » Mohamed Kordofani

 

Le passé esclavagiste soudanais a imprégné la société de racisme et de classicisme si bien que des siècles plus tard certaines pratiques perdurent et l'idéologie gangrène les questions politiques et évidement économiques du pays. La division entre arabes privilégié·e·s et noir·e·s minoritaires fut également imposée par le colonisateur qui trouvait un intérêt économique à séparer intentionnellement et fermement le nord (arabe) et le sud (noir) créant ainsi un fossé entre les deux communautés. 50 ans de guerre civile s'en suivirent durant laquelle le prétexte religieux fut rapporté par le gouvernement islamiste dans les années 90 devenant ainsi une guerre entre un Nord musulman et un Sud chrétien.

En 2005, est conclu à Naivasha (au Kenya) un accord de paix permettant la possibilité de sécession du Sud. En 2011, suite à un référendum voté à la quasi unanimité, est finalement créé le plus jeune état du monde : le Soudan du Sud.

 

Goodbye Julia - scène de réunion politique du SPLM (Sudanese People's Liberation Movement)

Goodbye Julia - scène de réunion politique du SPLM (Sudanese People's Liberation Movement)

 

Cette dynamique d’engagement et de retour (au pays) se ressent dans l’œuvre. Il s’agit d’un projet personnel profond s’inscrivant dans une histoire nationale et humaine forte. Kordofani et son équipe nous livrent une pièce cinématographique racontant le passé proche - la séparation des deux Soudan - au cœur d’une actualité toute aussi déchirante - La Guerre des Généraux - pour mettre en lumière une puissante volonté de réconciliation.

 

Goodbye Julia Siran Riak Mohamed Kordofani

Siran Riak interprètre Julia dans Goodbye Julia, de Mohamed Kordofani

 

« Cette révolution est finalement le moment idéal pour monter ce film. » M. K.

 

Goodbye Julia, c’est la petite histoire qui rejoint la grande ou l’inverse. L’équipe du film abrite en elle-même les contradictions du pays. Au même titre que les protagonistes vont porter en eux une séparation, un déchirement qui sera aussi celui vécu par le Soudan.

Comédienne de théâtre, vocaliste et joueuse de qanûn, l'actrice principale, Eiman Yousif (Mona), à joué dans plusieurs pièces relevant des questions sociales soudanaises. La mannequin et miss Afrique-Malaisie Siran Riak (Julia) donne la réplique à Eiman Yousif, relevant ainsi le défi du cinéma dans son pays natal après une vie d’exil. Guer Duany (Majier), que la guerre a transformé en enfant soldat puis en réfugié, est devenu acteur aux États-Unis et joue dans plusieurs longs-métrages dont Le Caire Confidentiel de Tarik Saleh (2017).

 

Goodbye Julia - Eiman Yousif et Siran Riak - scène d'intérieur

Goodbye Julia - Eiman Yousif et Siran Riak - scène d'intérieur

« Le plus difficile était de trouver un équilibre entre cinéma d’auteur et cinéma populaire. » M. K.

 

Au-delà de la qualité et de la précision dans l’écriture sociale et politique, le réalisateur s’applique à proposer un film de cinéma intense oscillant entre action, suspens haletant et dialogues fins. Il filme le quotidien avec brio grâce à des plans resserrés qui s’applique sur des détails impromptus. Enfin, le travail de la lumière (du Sud-Africain Pierre de Villiers*) nous livre des images suspendues autant qu’époustouflantes, disséminées tout au long de l’œuvre.

Mohamed Kordofani prolonge l’histoire du cinéma soudanais en proposant une impulsion audacieuse et place le pays sur la carte pour nombre de cinéphiles à travers le globe. Il répond à ses propres questionnements en apportant un film d’intérêt général autant qu’un divertissement de qualité. Goodbye Julia est une œuvre qui s'inscrit à la fois dans un cheminement personnel et dans une problématique universelle. La planète compte malheureusement trop de communautés écrasées par d'autres (elles-mêmes embrigadées par leurs gouvernants). Ce n'est pas sans rappeler l'actualité moyenne-orientale où au nom d'un livre sacré on rase des villes entières et extermine un peuple.

 

Cinewax est heureux de vous partager ce film africain qui ouvrira aux spectateurs de nouvelles perspectives sur l'Afrique de l'Est.

Goodbye Julia mohamed kordofani Cinewax poster affiche

 

Goodbye Julia - Voir les séances

*Pierre de Villiers

Rédacteur Cinewax : Alif

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